L'oeil et la Main, les artisans de la Haute Couture

Extrait de « L’œil et la main, les artisans de la Haute Couture »

Ed. du Collectionneur – 2005

C’est une sorte de petit jardin extraordinaire. Un atelier en pleine lumière où les plantes ont pris leur place dans la profusion et où les bijoux sont parsemés ici ou là. Comme des points de détail. Sous la verrière, une grande table autour de laquelle s’activent Stefano Poletti et son assistant, Jean-Michel. On martèle le métal, on enfile les perles, on monte sur fil de fer, ici, ce sont eux qui créent chaque bijou à la main, un à un. Et une stagiaire joue de temps en temps les petites mains supplémentaires,c’est tout. Pourtant, pas de formation de joaillerie ou d’orfèvrerie pour Stefano Poletti .

 

Le créateur s’est fait tout seul. Né  en 1958, il commence par une école de stylisme en Italie, puis le cours Berçot à Paris « pour mieux connaître la France ». Comme la plupart des étudiants, Stefano Poletti n’échappe pas à l’éternel stage. Son choix est clair : il veut travailler avec Alaïa, parce qu’il trouve que c’est le meilleur. Il le pense toujours d’ailleurs. « Azzedine Alaïa ne s’arrête jamais. Quand j’arrivais le matin, il était déjà  en train de travailler. Et quand je repartais le soir, parfois à minuit, il travaillait toujours. Du croquis à la première pièce, jusqu’au  studio photo, c’est lui qui dirige tout. Qui fait tout. C’est un vrai couturier, au sens noble du terme, le seul qui fasse tout de A à Z. Et j’ai compris en travaillant avec lui que ce que je préférais, c’était travailler avec mes mains. Et si je me suis  tourné vers le bijou, c’est aussi parce que c’était plus facile, économiquement, de faire des petites pièces. »

 

 En 1987, Stefano se lance. Il travaille d’emblée pour le défilé de Thierry Mugler et dessine une collection d’accessoires pour Elisabeth de Senneville. Deux univers très particuliers, à l ‘avant garde de l’époque, avec une dose de futurisme pour le premier et une pointe de nouvelles technologies pour la seconde. « C’était une période folle. Cela pouvait m’arriver de finir des bijoux à 2 h du matin pour les défilés de Thierry Mugler. Et à 4 h du matin, son équipe me rappelait pour ajouter d’autres choses !

 

C’est euphorisant de faire partie de ces excès. « E parallèle, Stefano crée sa propre collection et la diffuse dans quelques boutiques. Les choses s’enchaînent  assez vite, son nom circule, il monte son entreprise, les grands noms du prêt-à-porter l’appellent, et peu de défilés se font sans ses bijoux. Le seul hic, c’est que, dans les années 90, les tendances tournent et le minimalisme est roi. Les bijoux font alors triste mine et Stefano se tourne vers la haute couture. « Pour Thierry Mugler, je réalisais les bijoux à la main, mais en toutes petites séries. Au contraire, dans la haute couture, chaque bijou est fait pour une robe précise. C’est une pièce véritablement unique.

 

À l’époque, je commençais à travailler le verre soufflé. Comme ça collait au style de Christian Lacroix, j’ai appelé sa maison de couture. C’est comme ça que tout a commencé, et je continue à travailler avec lui régulièrement. Il me donne des collages et des croquis pour dessiner l’esprit et les grandes lignes de son défilé, mais parfois ce sont  aussi ses gestes ou le ton de sa voix qui vont me guider. C’est très important d’être en relation directe avec le couturier. Beaucoup sont protégés par leurs assistants. Mais pour nous, c’est tellement plus facile quand on leur parle directement. On saisit bien plus aisément l’idée. »

 

Pour ses bijoux,  et encore plus pour la haute couture, Stefano Poletti imagine ses propres techniques. Les croquis sont rares, il préfère montrer directement le bijou et présente ainsi un prototype au couturier. « Le croquis, s’il existe, est juste là pour me rappeler une idée ou une technique. Je préfère travailler directement un prototype. Avant, les maisons de couture ne parlaient jamais de prix. Aujourd’hui, je leur fais un devis avant de commencer à travailler le prototype. »  À la technique de suivre les envies du créateur. « J’aime le strass, mais je le trouve trop clinquant. J’ai donc décidé de le casser par le choc thermique, pour qu’il réfléchisse la lumière de manière différente.

 

C’est plus une idée qu’une véritable technique, mais ce sont des détails qui font la différence. D’autre fois , j’utilise du cristal transparent que je peins à  la dernière minute selon la robe  avec laquelle il va être associé pour le défilé. » De son Italie natale, Stefano Poletti  aime aussi ramener verre et miroir gravé, travaillés à l’ancienne. C’est à Venise , dans un petit  atelier artisanal de Murano, qu’il fait souffler de précieuses perles de verre. « Ils parviennent à copier des pièces anciennes, notamment les fleurs en verre qui retiennent les miroirs vénitiens.

 

C’est très rare de savoir reproduire  à ce point d’exactitude une technique ancienne. Moi , j’utilise ces fleurs en verre pour en faire des bijoux. » C’est à Venise encore, que Stefano trouve des artisans qui maîtrisent toujours la technique des miroirs vénitiens. « Je les ai convaincus  de réaliser des petites pièces découpées  de miroirs, pour des bijoux. »  Sur ces fragments de miroirs, abîmés et vieillis, il grave des mots laissés à Casanova par Henriette. « C’est la seule femme que le séducteur a aimée, et elle l’a quitté. « Tu oublieras Henriette », écrit-elle sur la vitre au moment de partir.

 

J’ai repris ces écrits du XVIIIe siècle pour les graver sur des miroirs, montés en bijoux. J’aime que  mes créations racontent des histoires. Au début des années  90, Stefano imagine un pendentif bulle de verre dans lequel grandit une pousse  de lierre. C’est Botanicus, un mini-jardin à porter sur soi ou à suspendre chez soi.

Un véritable symbole à  l’image de l’atelier, avec sa verrière et ses plantes. « Mon travail est très proche de la nature », explique t-il. Une véritable inspiration plus qu ‘un  clin d’œil, à l’image de cette boîte à gâteaux remplie de foin coupé dans laquelle le créateur n’hésite pas à plonger le nez pour se ressourcer.

 

Cette nature fantasmée, on la retrouve dans ses bagues pistils ou ses ellébores bijoux. « J’ai une collection d’hellébores sur le rebord de ma fenêtre, c’est comme ça que j’ai créé une série de bijoux sur ce thème, en métal martelé. » Et Stefano d’imaginer au gré  de ses envies. « Je ne porte jamais de bijoux. Une fois qu’on les crée, on en a envie. Mais dés qu’ils sont finis, on a déjà envie d’autre chose.

“…Mi piace che le mie creazioni raccontino delle storie…”. E’ una specie di piccolo giardino straordinario. Un atelier in piena luce dove le piante hanno conquistato il loro spazio contendendolo ai bijoux sparsi ovunque. Sotto la vetrata una grande tavola attorno alla quale sono seduti Stefano Poletti e il suo assistente. Si martella il metallo, si infilano perle, si montano sul filo di ferro. Sono loro che creano ogni bijoux a mano uno ad uno. E a parte l’aiuto di una stagista che a volte gli da una mano, è tutto. Comunque nessuna formazione da gioielliere o scuola di oreficeria per Stefano Poletti. L’artista si è fatto da solo.

 

Nato nel 1958 comincia in una scuola di stilista in Italia. Poi il corso Bercot a Parigi “…per meglio conoscere la Francia…”. Come la maggior parte degli studenti Stefano non sfugge all’esperienza da stagista, la sua scelta è chiara: vuole lavorare con Alaia perché pensa sia il migliore. E lo pensa a tutt’oggi.”…Azadin Alaia non si ferma mai. Quando arrivavo al mattino stava già lavorando. E quando tornavo a casa la sera a volte a mezzanotte lui lavorava ancora. Dal primo schizzo al prototipo fino al servizio fotografico è lui che dirige tutto. Che fa tutto. È un vero Couturier, nel senso nobile del termine. Il solo che faccia tutto dall’A alla Z e ho capito lavorando con lui che quello che preferivo era lavorare con le mie mani. Era già molto tempo che lo facevo, ma ne ho preso pienamente coscienza solo in quel momento. E se mi sono rivolto al bijoux, è anche perché era più facile economicamente, rispetto a fare una collezione di abiti…”.

 

Nel 1987 Stefano si lancia. Lavora subito per la sfilata di Thierry Mugler e disegna una collezione di accessori per Elisabeth de Senneville. Due universi molto particolari per il tempo. Due avanguardisti caratterizzati da una dose di futurismo per il primo e dal fascino di nuove tecnologie per la seconda.”…Era un periodo folle… e poteva succedermi di finire i bijoux alle due del mattino per le sfilate di Thierry Mugler e alle quattro del mattino i suoi collaboratori mi chiamavano per aggiungere delle altre cose. Era molto eccitante fare parte di questi eccessi…”. Parallelamente Stefano crea la propria collezione e la diffonde in alcune boutique. Le cose iniziano a girare molto velocemente. Il suo nome circola, cresce la sua impresa, i grandi nomi del pret a porter lo chiamano e poche sfilate si fanno senza i suoi gioelli.

 

Il problema è che negli anni novanta le tendenze cambiano ed inizia a regnare il minimalismo. I bijoux allora fanno una triste fine e Stefano si rivolge all’ alta moda.”…già per Thierry Mugler realizzavo i bijoux a mano ma erano tutti parte di piccole serie. Invece nella Alta Moda ogni gioiello è un originale esclusivo abbinato ad un abito preciso ed un pezzo unico. In quel periodo ho cominciato a lavorare il vetro soffiato. Siccome richiamava lo stile di Christian Lacroix  mi sono messo in contatto con la sua casa di moda.

 

E’ così che tutto è cominciato e continuo a lavorare con lui regolarmente. Lui mi da dei collage e degli schizzi con i quali ha tracciato lo spirito e a grandi linee i soggetti della sua sfilata ma a volte sono più i suoi gesti o il tono della sua voce che mi guidano. E’ molto importante essere in relazione diretta con lo stilista. Molti sono protetti dai loro assistenti ma per me è molto più facile quando riesco a parlare con loro direttamente. Riesco a comprendere l’idea centrale molto più facilmente…”.

 

Per i suoi bijoux e ancora di più per l’Alta Moda Stefano Poletti crea da sé delle proprie tecniche. Gli schizzi sono rari. Preferisce lavorare direttamente sul gioiello e presentare così un prototipo allo stilista.”…lo schizzo se esiste è fatto solo per ricordarmi una idea o una tecnica. Preferisco lavorare direttamente sul prototipo. Un tempo le case di moda non parlavano mai di prezzo. Oggi gli faccio un preventivo prima di cominciare a lavorare al prototipo…”. La tecnica si piega per seguire le idee del suo creatore.”…mi piace lo strass ma lo trovo spesso troppo brillante.

 

Ho quindi deciso di romperlo con uno shock termico in modo che riflettesse la luce in maniera diversa. E’ più una idea di una vera tecnica. Sono i dettagli che fanno la differenza. Altre volte utilizzo del cristallo trasparente che dipingo all’ultimo momento accordandolo al vestito al quale va associato per la sfilata…”. Delle sue origini italiane Stefano Poletti ama anche portare con sé vetro e specchio inciso  lavorato all’antica. E’ a Venezia in un piccolo atelier artigiano di Murano che fa soffiare delle preziose bolle di vetro.”…Sotto le mie indicazioni gli artigiani riescono a riprodurre i pezzi antichi come ad esempio i fiori in vetro che ricordano gli specchi veneziani.

 

E’ molto difficile saper riprodurre con questa precisione una tecnica antica. Io utilizzo questi fiori in vetro per fare dei gioielli…”. È ancora a Venezia che Stefano Poletti trova degli artigiani che padroneggiano molto bene la tecnica degli specchi veneziani.”…li ho convinti a realizzare dei piccoli frammenti per dei gioielli...”.Su questi frammenti di specchio, rotto e invecchiato, incide delle parole lasciate a Casanova da Henriette.”…è la sola donna che il seduttore ha veramente amato e lei lo ha lasciato.…tu oubliera aussi Heriette… scrive lei sul vetro al momento di lasciarlo. Ho ripreso questi scritti del diciottesimo secolo per inciderli su degli specchi montati su gioielli. Amo che le mie creazioni raccontino delle storie…” ed i suoi bijoux sono dei pretesti per mille storie.

 

Agli inizi degli anni novanta Stefano Poletti immagina un pendente con una bolla di vetro all’interno della quale possa crescere un germoglio di edera: Botanicus! Un mini giardino da indossare o sospendere in un angolo della propria casa. Un vero simbolo che rappresenta il suo atelier con la sua vetrata e le sue piante.”…il mio lavoro è molto vicino alla natura…” spiega. “…La natura  è una vera ispirazione più che un gioco…” mi dice accennando alla scatola di biscotti riempita di  fieno  nella quale l’artista non esita a tuffare il naso per rigenerarsi . questa natura sublimata la si ritrova nelle sue spille “pistilli” o i suoi bijoux “elleboro”. “…Ho una collezione di ellebori sul davanzale della mia finestra è così che ho creato una serie di gioielli su questo tema in metallo martellato…non porto quasi mai dei gioielli. Ne ho voglia mentre li sto creando ma appena sono finiti ho già voglia di qualcos’altro…”